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Des installations de plus en plus nombreuses

Un recensement des laboratoires de biosécurité de niveau P4.

mai 5, 2023
par Pierre Deschamps


(Crédit photo : King’s College)

La pandémie de COVID-19 a projeté à l’avant-scène l’Institut de virologie de Wuhan, en Chine. Certains observateurs ont soupçonné un temps que le virus s’était échappé de ce laboratoire de biosécurité de niveau P4 (BSL 4, en anglais pour biosafety level 4), une catégorie de laboratoires susceptible d’abriter des micro-organismes très pathogènes, pour lesquels aucun traitement n’est parfois disponible. À ce jour, rien ne permet d’établir que le virus SARS-CoV-2 à l’origine de cette pandémie proviendrait de ce laboratoire.

Au cœur de cette pandémie qui a paralysé des pans entiers de l’économie mondiale, des universitaires, menés par Filippa Lentzos, chercheuse principale au King’s College, de Londres, se sont lancés dans un projet d’envergure : recenser les installations où sont entreposés et étudiés des agents pathogènes hautement dangereux.

La publication en 2021 d’un premier rapport par ce groupe d’universitaires à l’origine de l’initiative Global BioLabs avait permis d’identifier cinquante-neuf laboratoires de type P4 dans le monde.

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Dans le rapport 2023 publié en mars dernier, Global BioLabs a identifié dix laboratoires de plus, disséminés dans vingt-sept pays. Le document présente les mesures prises dans ces pays pour prévenir les risques liés à ces activités et plaide pour un renforcement de la supervision internationale de telles installations. Ce rapport est accessible en ligne à l’adresse apparaissant à la fin de cet article.

Soulignons tout d’abord que le nombre de laboratoires P4 « augmente rapidement, la plupart des nouvelles constructions ayant lieu en Asie. L’Inde à elle seule a annoncé des plans pour quatre nouveaux laboratoires. De plus, environ 75 % des laboratoires P4 opérationnels existants se trouvent dans des villes, où des populations denses pourraient exacerber l’impact d’un rejet accidentel. »

Par ailleurs, il faut noter que : « Plus de 60 % des laboratoires P4 sont des établissements de santé publique gérés par le gouvernement, principalement axés sur la santé humaine plutôt que sur la biodéfense. Plus de la moitié des laboratoires P4 qui travaillent avec des animaux infectés – les laboratoires AP4 – se trouvent aux États-Unis. »

Les travaux du Global BioLabs ont permis d’identifier « deux tendances notables concernant les caractéristiques spécifiques des laboratoires P4. Premièrement, environ la moitié de tous les laboratoires P4 ont une superficie inférieure à 200 mètres carrés, et seulement neuf des laboratoires mesurent plus de 1 000 mètres carrés. En d’autres termes, environ la moitié des laboratoires BSL4 sont inférieurs à la taille d’un court de tennis.

Deuxièmement, en ce qui concerne l’équipement de protection individuelle, la majorité des laboratoires P4 exigent que le personnel travaille dans des combinaisons à pression positive avec leur propre alimentation en air. Seuls sept laboratoires P4 effectuent leurs travaux uniquement dans des enceintes de biosécurité. »

Le premier chapitre du rapport 2023 porte sur les tendances nouvelles et mises à jour dans les données mondiales du laboratoire P4. Le deuxième est une présentation des données de laboratoire mondiales et des tendances nouvelles et mises à jour dans les données de laboratoire mondiales P4.

Le troisième regroupe les tableaux de bord nationaux de gestion des risques biologiques. Le quatrième traite de gouvernance et de stabilité politique. Le cinquième met de l’avant la gouvernance internationale de la gestion des risques biologiques. Enfin, le sixième regroupe les huit principales recommandations formulées par les universitaires regroupés dans Global BioLabs. Les voici.

ADOPTER LA NORME ISO 35001. Les laboratoires effectuant des travaux à hauts risques avec des agents pathogènes devraient adopter la norme internationale de gestion des risques biologiques ISO 35001.

INTÉGRER DES NORMES MONDIALES VOLONTAIRES. Les États devraient intégrer des normes mondiales volontaires sur la gestion des risques biologiques dans la législation et les orientations, y compris le Cadre mondial d’orientation pour l’utilisation responsable des sciences de la vie 2022 de l’OMS, les Lignes directrices WOAH 2019 pour une conduite responsable dans la recherche vétérinaire et les Lignes directrices sur la biosécurité de Tianjin pour les codes de conduite pour les scientifiques.

METTRE AU POINT DES NORMES DE SÉCURITÉ BIOLOGIQUE. Les États devraient développer des normes de sécurité biologique sur le terrain.

ADOPTER ET PARTAGER LES MEILLEURES PRATIQUES. Les États et leurs laboratoires biologiques à hauts risques devraient mettre en œuvre et partager les meilleures pratiques et participer à des examens par les pairs des pratiques de gestion des risques biologiques dans les laboratoires homologues.

SE DOTER D’UNE ASSOCIATION NATIONALE DE BIOSÉCURITÉ. Les États qui n’ont pas encore d’association nationale de biosécurité devraient encourager et soutenir la création d’une association par des professionnels de la biosûreté et de la biosécurité.

FOURNIR DES rapports complets, réguliers et transparents. Les États devraient fournir des rapports complets, réguliers et transparents, comme l’exigent les mesures annuelles de renforcement de la confiance de la Convention sur les armes biologiques et la résolution 1540 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

PRENDRE DES MESURES CONCRÈTES. L’OMS devrait prendre trois mesures concrètes pour renforcer la surveillance internationale de la gestion des risques biologiques :

a. Développer des critères et des conseils pour les laboratoires concernés.
b. Fournir sur le terrain des conseils sur la biosécurité.
c. Établir des centres collaborateurs pour la gestion des risques biologiques en Afrique, en Asie du Sud-Est, en Méditerranée orientale et dans le Pacifique occidental afin que chaque région de l’OMS dispose d’au moins un centre de ce type.

Tirer parti des organisations internationales. Les États devraient tirer parti des organisations internationales de gestion des risques biologiques existantes, telles que l’IFBA, l’infrastructure européenne de recherche sur les agents hautement pathogènes (ERINHA), le réseau de laboratoires zoonotiques de niveau 4 de sécurité biologique (BSL4ZNET), et IEGBBR, pour renforcer la gestion mondiale des risques biologiques en fournissant une éducation, une formation et les meilleures pratiques pour l’adoption généralisée de la norme ISO 35001 et mettre en place un mécanisme international pour vérifier le respect de la norme.

Comme le souligne les auteur du rapport, « de plus en plus de pays construisent des laboratoires à haut confinement, développent des biotechnologies à double usage et mènent des recherches à risque avec des agents pathogènes. Les dangers posés par une dissémination accidentelle ou délibérée d’un agent pathogène à capacité pandémique signifient que le renforcement de la surveillance internationale des sciences de la vie sont essentielles ».

En outre, en raison, « de la complexité croissante du paysage des risques biologiques et des contraintes géopolitiques à l’adoption d’une réponse multilatérale robuste, un effort concerté pour exploiter les mécanismes internationaux informels existants, tout en jetant les bases de futures initiatives multilatérales, offre la meilleure chance de faire progresser l’action collective pour garantir que la vie la recherche scientifique dans le monde est menée de manière sûre, sécurisée et responsable ».
www.globalbiolabs.org


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