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Quand la pierre devient papier

février 5, 2018
par Pierre Deschamps



Argile blanche, friable et réfractaire, le kaolin est surtout utilisé en médecine pour tester la coagulabilité du plasma, dans la fabrication de la porcelaine et dans l’industrie du papier. Dans cette dernière, l’emploi du kaolin, comme charge dans la masse et comme revêtement de surface, fait en sorte de limiter la quantité de pâte à papier et d’améliorer la brillance, l’éclat et l’opacité du papier.

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Voilà que tout récemment qu’on s’est mis à parler, en Europe surtout, de « feuille de pierre » pour désigner, non quelque chose issu d’un monde parallèle ou de l’univers d’Harry Potter, mais d’un papier qui utilise le kaolin comme matière première (80 %) et du polyéthylène (20 %), un produit non toxique.

Comme l’explique Pascal Parmentier, le directeur de l’imprimerie Primset à Saint-Evarzec, en Bretagne (France) et un des fondateurs de la toute nouvelle entreprise Armen Paper créé tout récemment pour fabriquer justement des feuilles de pierre, « le procédé de fabrication de la feuille de pierre est simple : une fois que la poudre de pierre est réduite en grains de 3 à 5 microns, on constitue des pelettes, une sorte de boulettes qu’on lamine pour obtenir des feuilles de papier que l’on met en bobines ».

Qui plus est, le procédé de fabrication des « feuilles de pierre » est un « procédé très écologique. Pour fabriquer une tonne de papier classique à base de cellulose, on coupe 20 arbres, et on utilise 60 000 litres d’eau. Alors qu’avec la feuille de pierre, on n’utilise ni arbres, ni eau. On réduit de 900 kg par tonne l’empreinte carbone : pas d’eau, pas de chauffage, pas de produits chimiques. Les rouleaux sont juste chauffés à 160 °C. Et ce papier est recyclable à 100 %, contrairement au papier classique qui n’est recyclable que trois fois maximum ».

Autres avantages non négligeables : la « feuille de pierre » est un papier difficilement déchirable et imperméable, ce qui lui assurerait un bel avenir dans de nombreux usages, notamment dans l’industrie agroalimentaire.

L’aventure tout récente d’Armen Paper, installée en Bretagne (France), débute quand Pascal Parmentier est invité par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bretagne Ouest (CCIMBO) à se joindre à une mission industrielle à Taïwan : « Nous sommes allés y rendre visite à une entreprise qui y fabrique de la feuille de pierre à base de calcaire ». Séduit, il convainc à son retour trois autres investisseurs. Ensemble, ils créent Armen Paper.

Pour l’instant, le projet vise à expédier à Taïwan du kaolin provenant de carrières locales (Plœmeur dans le Morbihan et Loquefret dans le Finistère) dans le but de « créer notre feuille de pierre de Bretagne à base d’argile blanche, la kaolinite ». C’est ainsi que quelque six tonnes de kaolin s’apprêteraient « à partir dans des containers de vingt pieds pour démarrer la fabrication. Le but est d’envoyer au total quarante tonnes de matière première bretonne » au cours des prochains mois.

« Actuellement, nous cherchons des industriels qui pourraient investir dans des machines spécifiques afin de pouvoir fabriquer localement ce papier. Des pourparlers sont déjà en cours. Car en plus de toutes ses qualités intrinsèques, le feuille de pierre est bien moins chère que le papier classique [3,50 euros le kilo contre 10,30 euros le kilo, sur le marché français], ce qui fait espérer de belles possibilités de vente ».

Notons qu’au Québec les gisements de kaolin (Château-Richer, Point Comfort, Saint-Jovite, Saint Rémi-d’Amherst, Saint-Donat, Brébeuf, entre autres) fournissent « un produit de faible blancheur qui ne possède pas les caractéristiques requises pour pouvoir être utilisé comme matière de charge ou comme agent de couchage dans la fabrication du papier ».

Quoi qu’il en soit, feuille de pierre ou de papier, qu’importe, ca qui disait que le papier n’avait plus d’avenir ?

http://www.primset.com


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