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Les défis de l’automatisation et l’innovation au coeur du 24e SIMU à Montréal

mai 30, 2013
By  Eric Cloutier



par Eric Cloutier

 

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Le 24e SIMU (Salon industriel de la maintenance et de l’ingénierie d’usine), tenu les 23 et 24 avril à Place Bonaventure de Montréal, a particulièrement mis l’accent sur deux grands thèmes abordés lors des différentes conférences présentées dans le cadre de cet événement qui a réuni plus de 1600 personnes: les défis de l’automatisation et l’innovation.

 

 

Ces deux thématiques ont été largement évoquées par l’économiste Simon Prévost, président de l’association Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ), dans une conférence d’ouverture ayant pour titre «Le manufacturier, fer de lance de notre avenir économique».

 

«En matière de productivité au Québec depuis 2007 environ, le secteur manufacturier enregistre un taux de croissance plus élevé au Québec qu’au Canada et qu’en Ontario particulièrement. C’est la bonne nouvelle», lance d’emblée Simon Prévost.

 

 

Selon lui, de plus de manufacturiers ont recours à la méthode de gestion «lean» développée avec succès par Toyota voilà plusieurs années. Le système de gestion «lean» repose avant tout sur une communication quotidienne entre les dirigeants des différents départements d’une entreprise et leurs employés, un contrôle et un rehaussement tout aussi quotidiens des opérations de l’entreprise, ainsi que sur une standardisation de ses processus de travail et une culture de supervision disciplinée.

 

«La moins bonne nouvelle cependant, c’est qu’en regardant l’ensemble de l’économie, on constate que le Québec ne se distingue pas particulièrement des autres provinces. Le secteur manufacturier au Québec est relativement plus productif que l’ensemble de l’économie. Par contre, nous sommes en retard sur les autres provinces en matières de services. Depuis une quinzaine d’années au Québec, chaque heure travaillée par un employé, par exemple, amène moins d’argent que chaque heure travaillée en Ontario», souligne M. Prévost.

 

Celui-ci fait également la comparaison entre le Québec et les États-Unis. Il précise que le Québec enregistre d’un déficit de productivité par heure travaillée de l’ordre de 25% par rapport à ses voisins du Sud.

 

«Autrement dit, il en coûte plus cher pour produire une unité de bien au Québec qu’aux États-Unis», ajoute-t-il, en soulignant toutefois que la productivité manufacturière est plus facile à mesurer que celle pour l’ensemble des services publics.

 

Simon Prévost mentionne que les entreprises manufacturières québécoises ont beaucoup investi dans l’acquisition de machinerie depuis quelques années, ce qui les a placées actuellement en meilleure position que les autres provinces. Cependant, il estime que ces investissements se sont produits tardivement.

 

«Au tournant des années 2000, le dollar canadien était à son plus faible par rapport à la devise américaine. On a toujours dit que lorsque notre dollar était traditionnellement faible, les entreprises québécoises n’investissaient pas dans la machinerie et les équipements parce qu’on affirmait toujours que tout se qu’on produisait, même si nous n’étions pas productifs, coûtait moins cher. Quand le dollar canadien équivalait à 0,65 $ américains, c’était comme un rabais de 0,35 $ en partant pour les Américains qui achetaient nos produits. Ce qui signifie que lorsqu’on avait cette compétitivité artificielle parce que basée sur un dollar canadien faible, les entreprises manufacturières du Québec n’avaient théoriquement pas ressenti le besoin d’investir dans des équipements pour améliorer leur productivité», affirme M. Prévost.

 

Celui-ci met toutefois en relief une situation paradoxale en évoquant la croissance importante des investissements en machinerie et équipements effectué entre les années 1994 et 2000, à une époque de dépréciation importante de la devise canadienne par rapport au dollar américain.

 

«Ce que les manufacturiers ont fait à l’époque, c’est d’investir massivement dans l’achat de machinerie et d’équipements même si ça coûtait cher. À partir du moment où notre dollar s’est mis à grimper, on a assisté à une décroissance de ces investissements. C’est fondamental parce qu’on a pas injecté des fonds au bon moment», soutient-il, en précisant cependant que la part actuelle du Québec totalise 25 % des investissements canadiens en machinerie et équipements.

 

À son avis, les entreprises manufacturières devront poursuivre durant plusieurs années l’actuelle cadence d’investissements pour l’ajout de machinerie afin de rattraper leur important retard par rapport aux autres provinces et aux États-Unis, et ce même si 89% des entreprises québécoises achètent des technologies de pointe disponibles au Québec.

 

Les défis de l’innovation et de l’automatisation

 

Les investissements en R&D (recherche et développement) représentent le premier défi des manufacturiers québécois selon Simon Prévost qui estime que ces investissements demeurent relativement stables depuis une décennie. Au Québec, la R&D intra mura (effectuée à l’intérieur même des entreprises) représente des injections de fonds d’environ 2 milliards de dollars par année depuis dix ans. Selon lui cependant, la R&D au Québec ne débouche pas nécessairement toujours sur des innovations.

 

Un autre des défis évoqués par Simon Prévost sera de concevoir, de développer et de produire davantage d’équipements de fabrication au Québec plutôt que de toujours les importer de l’extérieur.

 

«Actuellement, la fabrication de machinerie et d’équipements chez nous ne représente même pas 10% du total de ce qui se fait en R&D au Québec», soutient-il.

 

Un troisième défi pour le secteur manufacturier consiste à renverser la tendance de diminution des exportations de produits québécois à l’étranger.

 

«L’économie mondiale est un système fermé. Si quelqu’un exporte plus que nous, c’est peut-être nous qui exportons moins. En d’autres termes, tout le monde nous concurrence sur les mêmes dollars qui sont présents partout sur les marchés mondiaux», poursuit M. Prévost.

 

«Nous sommes en période de contexte économique relativement faible et nous enregistrons un certain déclin manufacturier depuis quelques années. En 2002, les manufacturiers représentaient 25% de l’économie du Québec et maintenant ils en constituent 16%. À ce chapitre toutefois, les États-Unis, la France et l’Ontario sont pires que nous. Aux États-Unis, les manufacturiers ne constituent que 10% de l’économie américaine, tandis qu’en Ontario, ils ne représentent que 12% de l’économie de cette province. Ce qu’il faut faire, c’est stopper ce déclin en allant sur les marchés étrangers et non en exportant des 2×4, des t-shirts ou des jeans, même si on a eu certains succès dans ces domaines par le passé. À ce propos, la dernière usine de fabrication de jeans en Beauce a fermé ses portes l’année dernière. C’est très difficile quand on fait un produit à faible valeur ajoutée de concurrencer d’autres pays qui produisent la même chose à faibles coûts», croit-il.

 

Le faible taux d’automatisation des entreprises manufacturières au Québec et la faible possibilité de voir le dollar canadien retourner à l’équivalent de 0,65 $ US pour offrir une compétititivité artificielle aux entreprises québécoises et canadiennes mènent celles-ci à l’obligation d’innover. Selon lui, c’est le secteur manufacturier qui détient la vaste majorité des investissements privés au Canada (56%) et des brevets spécialisés (80%) sur différentes inventions, ainsi que le plus grande haut taux de R&D. À ses yeux, les manufacturiers seront forcément le moteur de l’innovation au Québec.

 

«Chaque dollar dépensé crée 32 $ de retombées économiques en R&D parce que celle-ci va entraîner la fabrication de nouveaux produits, et cela même si la présence d’une forte réglementation et la restriction des marchés publics rendent souvent l’innovation plus complexe dans plusieurs domaines de l’activité manufacturière», explique Simon Prévost.

 

Dans un contexte économique plus mondialisé qu’en 1998, lors de la signature de l’Accord sur le libre-échange Canada-États-Unis, et qu’en 1994, dans le cadre de la ratification de l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain) pour inclure le Mexique, Simon Prévost estime que les manufacturiers doivent composer avec l’incertitude économique et mettre des moyens concert en place pour en contrer les effets néfastes.

 

«À l’époque par exemple, la Chine était considérée comme un espèce d’entrepôt manufacturier du monde. Aujourd’hui, ce n’est plus ça la Chine. C’est un pays dont les entreprises viennent concurrencer nos marchés locaux. L’incertitude est partout et ça crée des difficultés de gestion pour les entreprises d’ici», poursuit-il.

 

Non seulement les entreprises québécoises devront constamment trouver des moyens d’innover sur tous les plans selon lui, elles auront également à composer avec un problème de relève en matière de reprise d’entreprises déjà existantes, à mettre en place et accentuer des procédés de production «lean», à développer des des réseaux entrepreneuriaux pour réduire leurs coûts de production et accroître leur productivité, à mettre à jour l’informatisation de leurs activités internes de production et de logistique, tout en développant des réseaux de partage d’informations par la mise en place entre autres de veilles stratégiques.

 

«Le nerf de la guerre en matière d’innovation et d’automatisation, c’est la gestion et la mutualisation de l’information. Trop de petites et moyennes entreprises sont mal gérées parce que trop de ces PME demeurent le nez collé sur leurs activités de production», conclut M. Prévost.

http://pmds-simu.com/fr/


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