Génie de Conception

Énergie Nouvelles
La montée en puissance de l’hydrogène

avril 2, 2018
par Pierre Deschamps



 

Principal constituant du soleil et de la plupart des étoiles, l’hydrogène a souvent fait rêver, au point où l’on a cru qu’il pourrait devenir une importante source d’énergie pour le transport des personnes et la production d’électricité. Si les espoirs ont souvent été déçus, voilà que depuis quelque temps il semble connaitre une embellie plus prometteuse que jamais.

 

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Au Québec, sans doute en raison de ses immenses ressources hydrauliques, l’hydrogène a donné lieu à quelques aventures, la plupart sans lendemain. Pour mémoire rappelons ce que disait naguère l’agence Science-Presse : « Le Québec est présent depuis 1987 sur la scène mondiale de l’hydrogène par le biais du projet pilote EQHH, pour Euro-Québec Hydro-Hydrogène […] Le projet EQHH (Euro-Québec Hydro-Hydrogène) a [toutefois] été abandonné en 1998, faute de fonds et d’appuis politiques ».

Puis, en décembre 1993, l’agence relatait que : « C’est au Québec que s’est tenu récemment le premier Sommet mondial sur l’hydrogène. C’est au Québec aussi, à Montréal, que sera établi le Conseil international de coopération et de développement de l’hydrogène, récemment créé. C’est le Bureau de normalisation du Québec qui a été choisi pour élaborer, pour le monde entier, des normes de sécurité quant à l’utilisation de l’hydrogène comme carburant». Difficile aujourd’hui d’apprécier véritablement l’héritage de cette époque.

Au début des années 2000 cette fois, le projet HERA réunissait Hydro-Québec CapiTech, l’allemand GfE Gesellschaft Electrometallurgie et Shell Hydrogen, avec pour objectif de développer, de produire et de commercialiser des systèmes de stockage d’hydrogène dans le monde entier. Là aussi sans suite réelle au Québec. Enfin, annoncé en 2009, un projet-pilote de 11 millions de dollars sur trois ans à l’aéroport Trudeau pour des véhicules à hydrogène est demeuré pour ainsi dire dans les cartons.

Et voilà qu’au tout début de cette année on apprenait que le gouvernement du Québec aurait l’intention de faire rouler une cinquantaine de voitures à hydrogène dans le cadre d’un projet pilote. Et qu’une station de recherche publique serait même installée à Québec.

Comme le rapportait alors la Presse Canadienne, « Le Québec pourrait devenir un producteur — et éventuellement un exportateur — d’hydrogène. C’est du moins le souhait exprimé par le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Moreau, jeudi [18 janvier 2018], lorsqu’il a annoncé au Salon de l’auto de Montréal que le Québec serait le banc d’essai canadien de la Toyota Mirai, première voiture à l’hydrogène à faire son entrée au Canada ».

Cela dit, il semblerait bien que l’on assiste actuellement sur la scène mondiale à une montée en puissance de l’hydrogène comme carburant dans le transport. D’ailleurs, le nombre et la diversité des annonces de toutes sortes laissent carrément entrevoir une percée certaine de l’hydrogène, au point que l’on peut désormais le qualifier de carburant de l’avenir.

L’annonce de la mise sur pied de l’Hydrogen Council lors du Forum Économique mondial 2017, à Davos, y est sans doute pour beaucoup. Comme le souligne le Conseil, cette « initiative mondiale, menée par des entreprises leaders dans les secteurs de l’énergie, des transports et de l’industrie, partage une vision et une ambition communes pour que à long terme l’hydrogène favorise la transition énergétique ». À ce jour, cet organisme rassemblerait quelque vingt-trois multinationales de l’automobile, de l’énergie et de l’industrie, ainsi qu’une quinzaine d’acteurs majeurs de la chaine de valeur hydrogène.

Cette annonce n’est pas surprenante dès lors que l’on observe ce qui se passe dans le domaine du transport. Toyota propose déjà la Mirai (autonomie de  502 km) qui, selon le constructeur, dépasse déjà « les 3 000 ventes en Californie… la Mirai représentant plus de 80 % de tous les véhicules à pile à hydrogène en circulation aux États-Unis ». Pour sa part, le constructeur automobile coréen Hyundai offre le VUS Nexo, dont une autonomie d’environ 600 km, un 0 à 100 km/h atteint en 9,5 secondes et une vitesse maximale de 179 km/h attirent déjà les regards. 

On ne s’étonnera pas non plus de la création, en mars dernier, par dix compagnies japonaises (dont les constructeurs automobiles Toyota, Honda, Nissan) et le français Air Liquide du consortium Japan H2 Mobility, une société destinée à accélérer la construction de stations de recharge d’hydrogène dans l’archipel japonais. L’objectif est d’y construire 320 stations d’ici 2025 et 900 d’ici à 2030. 

En outre, qui aurait pu penser jusqu’à tout récemment que cet engouement pour l’hydrogène gagnerait aussi les bolides haut de gamme, comme la H2 Speed produite par le célèbre carrossier italien Pininfarina et motorisée par le laboratoire d’ingénierie suisse GreenGT. Dévoilée au récent Salon automobile de Genève, cette voiture dotée d’un moteur à hydrogène est en fait la première voiture de sport électrique-hydrogène au monde. Ses caractéristiques techniques sont tout à fait époustouflantes : puissance de 653 chevaux, 0 à 100 km/h en 3,4 secondes, vitesse maximale dépassant les 300 km/h. Les premiers exemplaires de ce bolide, dont la production sera limitée à une douzaine, seront livrés d’ici la fin de l’année. Mais il n’y a pas que l’automobile qui carbure à l’hydrogène. En effet, vélo, camion et autobus s’y mettent aussi. 

Côté vélo, il y a ceux de la société française Pragma Industries qui en a déjà écoulé plusieurs dizaines. Ces vélos disposent d’une autonomie d’une centaine de kilomètres, pour une recharge en 30 secondes. 

Côté camion, mentionnons que Renault Trucks a expérimenté en 2015-2016, en partenariat avec La Poste française, un modèle Maxity Électrique intégrant une pile à combustible fonctionnant à l’hydrogène, développée par Symbio FCell. Quant à Toyota, il annonçait en 2016 le lancement d’une étude de faisabilité en Californie pour ses camions alimentés à l’hydrogène. 

Coté autobus, il y a notamment ceux du constructeur belge Van Hool qui livrera prochainement une quarantaine de véhicule alimentés à l’hydrogène à la ville de Cologne en Allemagne. Et Toyota, qui en prévision des Jeux olympiques de Tokyo en 2020 – une vitrine de classe mondiale –, fournira pour l’occasion ses FC Bus (77 passagers, autonomie de 200 km, recharge en dix minutes). En France, Air Liquide a ouvert fin mars une station d’hydrogène pour les autobus urbains qui circuleront en région parisienne. En Belgique, une station d’hydrogène publique exploitée par Air Liquide est opérationnelle depuis 2016 dans la ville de Zaventem.

Sans oublier le rail, avec le train à hydrogène d’Alstom dévoilé au salon InnoTrans tenu à Berlin en 2016. Alstom, dont le secteur transport est passé en septembre dernier sous le contrôle de Siemens, a signé à l’automne 2017 un accord avec la région allemande de Basse-Saxe pour lui livrer quatorze rames de ce train baptisé « Coradia iLint ». 

Même les charriots élévateurs industriels carburent à l’hydrogène. Tout récemment, les partenaires de l’appareil de ravitaillement en hydrogène Simplefuel H2 Appliance, développé en réponse au concours H2 Refuel H-Prize du Département américain de l’énergie, ont annoncé leur premier déploiement commercial au Japon. Avec l’appui du ministère japonais de l’Environnement, l’appareil SimpleFuel utilisera l’énergie solaire ou électrique pour produire et livrer, à la Kesen Precut Cooperative, une coopérative de production de bois de la préfecture d’Iwate, de l’hydrogène pour alimenter un charriot élévateur à fourche de marque Toyota. 

Et voilà que la voile aussi passe à l’hydrogène avec le catamaran Energy Observer, un bateau long de 30,5 m, autonome en énergie et propulsé grâce aux énergies renouvelables et à l’hydrogène. Depuis janvier 2017, il effectue un tour du monde d’une durée de six ans !

Bref, qui peut encore douter que l’hydrogène ne constitue pas une véritable solution énergétique dans le domaine du transport ?

http://hydrogencouncil.com

http://media.toyota.ca/fr/corporate

https://www.hyundaicanada.com

http://www.pininfarina.com/en/homepage/homepage.htm

https://www.pragma-industries.com

https://www.vanhool.be/fr/

https://www.airliquide.com/fr

https://www.renault-trucks.com/fr/

http://www.alstom.com

http://www.ivysinc.com/simplefuel-main-page

http://www.energy-observer.org


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